Années 2010, un journaliste vit de l'intérieur les convulsions de l'entreprise de presse pour laquelle il travaille depuis un certain temps : rachat, brutalité managériale, obsession du profit envers et contre tout... À l'occasion d'un plan de départs volontaires, il prend ses cliques et ses claques en saisissant au vol une opportunité de reconversion professionnelle. Mais, dans les méandres des organismes de formation qui sont un business à part entière, rien ne va se passer comme prévu, sous le regard de l'ex-homme d'information qui est aussi poète à ses heures perdues.
Au fil de ce roman, Eric Faye brosse le tableau d'une classe moyenne incapable de résister à l'offensive néo-libérale et de se mobiliser lorsqu'elle est attaquée.
«Un meurtre c'est fait pour que quelque chose s'arrête. Est-ce que c'est possible que les choses s'arrêtent, que ce ne soit pas toujours le même aplat de tout, sur le même ton, à la même vitesse qui vous avale, irrespirable, le souffle court, ne plus avoir d'oxygène au cerveau à force, est-ce que c'est possible que tout le monde se taise, que le bébé se taise, que sa mère se taise, que le dealer se taise, que les flics se taisent, que les juges se taisent, que tous ils se taisent. Qu'ils fassent ce qu'ils veulent de lui, il leur donne son corps, mais qu'il puisse se taire, qu'ils le laissent ne plus répondre.»
Isabel Rawsthorne est la créatrice d'une oeuvre picturale secrète et méconnue. On a surtout retenu d'elle et de sa vie aventureuse qu'elle fut l'amante solaire et le modèle d'Alberto Giacometti. Francis Bacon confia qu'Isabel fut son unique amante. Elle fut encore son amie, son modèle, sa complice jusqu'à la fin. Elle posa d'abord pour le sculpteur Epstein, pour Balthus, Derain. Picasso fit plusieurs portraits d'elle sans qu'elle cède à ses avances.
À travers Isabel, son foyer magnétique et sa liberté fracassante, on assiste à une confrontation entre deux géants de la figuration, Bacon et Giacometti. Au moment même où triomphe l'abstraction dont ils se détournent avec une audace quasi héroïque. Bacon, scandaleux, spectaculaire, carnassier, soulevé par une exubérance vitale irrésistible mais d'une lucidité noire sur la cruauté et sur la mort. Giacometti, poursuivant sa quête d'une ressemblance impossible, travailleur obsessionnel jusqu'à l'épuisement. Chez Isabel, la mélancolie alterne avec l'ivresse vagabonde.
Des années 30 à la fin du siècle, telle est la destinée de ce trio passionné, d'une extravagance inédite, partageant une révolution esthétique radicale et une complicité bouleversante.
De quoi parle Partout les autres ?
D'amours inaccomplies.
De folie destructrice.
De lieux chéris.
De violences qui laissent de marbre.
De cleptomanie, d'un rat philosophe et de noyaux de cerises.
Ici, l'humanité accepte sa complexité et son imperfection.
Elle se montre comme on se regarde dans la glace, comme on s'écoute dans le noir. Sans manières ni faux-semblants.
David Thomas est l'auteur de plusieurs romans et recueils d'instantanés,parmi lesquels La Patience des buffles sous la pluie, Un silence de clairière, Le poids du monde est amour. Son dernier recueil, Seul entouré de chiens qui mordent (L'Olivier, 2021), a reçu le prix de la Nouvelle de l'Académie française.
Walter Benjamin, l'un des plus grands mythes intellectuels du vingtième siècle, est toujours parmi nous. Un groupuscule d'extrême gauche porte son nom et réalise des actions militantes énigmatiques, tandis qu'un poète se suicide à la BNF à la suite d'une conférence sur le penseur. Alertés par cette mort étrange, trois spécialistes de Benjamin se lancent à la recherche de son dernier manuscrit. Le trio nous entraîne dans une enquête vertigineuse, véritable labyrinthe de fragments, où à chaque nouvelle page se dessine un peu plus la figure de Walter Benjamin.Roman polyphonique virtuose, Le vingtième siècle donne à penser notre contemporanéité de manière singulière et originale, et à relire l'histoire du siècle passé comme celui dont Benjamin aurait été le héros.
«Tuez-moi, sinon vous êtes un assassin.» Telles sont les dernières paroles de Franz Kafka qui implore une autre dose de morphine à Robert Klopstock, son ami étudiant en médecine. À son chevet, sa compagne Dora Diamant veille sur lui. Tandis qu'Ottla, la soeur chérie, attend à Prague des nouvelles. Robert, Dora, Ottla : ce roman raconte l'histoire de ces trois personnages clés de la vie de Kafka et entrecroise leurs destins, marqués au-delà de l'imaginable par sa présence et son oeuvre. Robert deviendra, à New York, un éminent chirurgien spécialiste de la tuberculose. Dora survivra à la persécution nazie puis stalinienne, en portant jusqu'à nous la mémoire de Kafka. Ottla, elle, accompagnera dans les chambres à gaz un groupe d'enfants juifs après avoir célébré, au camp de Theresienstadt, le soixantième anniversaire de la naissance de son frère. À travers ce roman dans le siècle, Laurent Seksik explore de manière inédite l'oeuvre et la vie de Franz Kafka. L'auteur des Derniers jours de Stefan Zweig et du Cas Eduard Einstein mêle à nouveau, avec émotion et érudition, la grande histoire et le tragique de vies façonnées par l'empreinte d'un géant.
Le froid est un adversaire redoutable qui met tout le monde au diapason : qui ne s'adapte pas à ses rigueurs risque d'y laisser sa peau. Les bêtes font leur poil d'hiver, les hommes s'emmitouflent, et chacun rêve secrètement d'une hibernation qui ne prendrait fin qu'au retour des beaux jours. Mais au fait, qu'est-ce que le froid et comment délimiter son empire ?
Fort de ses voyages dans les régions du monde où le froid est le plus tenace, François Garde se propose de cerner cet adversaire à travers 99 textes surprenants, insolites, drôles, poétiques. Ces variations qui vous feront frissonner sont à savourer bien au chaud.
Une mauvaise herbe entre deux plaques de bitume. Le soleil printanier chauffant les pommettes. Une voiture brûlée dans un décor intact. Une maison en cours de réfection. Le lit d'une rivière redessinant ses contours. Viser une cible en plein centre. Viser une cible à côté. Marcher dans l'eau. S'entendre raconter une vie qui n'est pas la sienne. Être tenté de l'essayer pour voir ce qu'elle a de si désirable. Prendre une photo qui ne parlera qu'à soi. Attendre. Déblayer un chemin. Trouver une clairière. S'asseoir. Choisir sa route. La tension dans les muscles. Faire la course. Distinguer les couleurs. Trouver une personne belle. Le lui dire. S'installer près de l'eau. Écouter les histoires. Prendre le visage des autres. Se glisser dans leur peau. Vivance.
« Comment l'appeler ?
Je dis Anne, mais cette fausse intimité me met mal à l'aise. Je ne peux pas dire Anne, quelque chose m'en empêche, qui, au cours de la nuit, se matérialisera par l'impossibilité de rester dans sa chambre. Alors je dis Anne Frank, comme on évoque l'ancienne élève brillante d'un collège fantomatique. Deux syllabes.
Anne Frank, une histoire que « tout le monde connaît » tellement qu'il n'en sait pas grand-chose. Car « tout le monde connaît » ne dit pas que « tout le monde sait », mais qu'on est pressé de passer à autre chose, de le ranger au Musée, ce petit fantôme.
La Maison Anne Frank est un appartement vide. C'est l'absence de ses habitants devant laquelle les visiteurs défilent. C'est le vide qui transforme cet appartement, l'Annexe, en musée. Mais le vide n'existe pas. Il est peuplé de reflets qui témoignent de l'abîme, celui de la disparition d'Anne Frank.
Toute la nuit, j'irai d'une pièce à l'autre, comme si une urgence se tenait tapie encore, à retrouver. »
Quarante ans après la mort de son oncle Désiré, Anthony Passeron décide d'interroger le passé familial. Évoquant l'ascension de ses grands-parents devenus bouchers pendant les Trente Glorieuses, puis le fossé grandissant apparu entre eux et la génération de leurs enfants, il croise deux histoires : celle de l'apparition du sida dans une famille de l'arrière-pays niçois - la sienne - et celle de la lutte contre la maladie dans les hôpitaux français et américains.
Dans la lignée d'Annie Ernaux ou de Didier Éribon, Anthony Passeron mêle enquête sociologique et histoire intime. Dans ce roman de filiation, il évoque la solitude des familles à une époque où la méconnaissance du virus était totale, le déni écrasant, et le malade considéré comme un paria.
11835. Gus, un jeune scientifique, est envoyé par le musée d'Histoire naturelle de Lille pour étudier la faune du nord de l'Europe. Lors d'une traversée, il assiste au massacre d'une colonie de grands pingouins et sauve l'un d'eux. Il le ramène chez lui aux Orcades et le nomme Prosp. Sans le savoir, Gus vient de récupérer le dernier spécimen sur Terre de l'espèce. Une relation bouleversante s'instaure entre l'homme et l'oiseau. La curiosité du chercheur et la méfiance du pingouin vont bientôt se muer en un attachement profond et réciproque.
À l'heure de la sixième extinction, Sibylle Grimbert convoque un duo inoubliable et réussit le tour de force de créer un personnage animal crédible, avec son intériorité, ses émotions, son intelligence, sans jamais verser dans l'anthropomorphisme ou la fable. Le Dernier des siens est hanté par une question aussi intime que métaphysique : que veut dire aimer ce qui ne sera plus jamais ?
Sibylle Grimbert est éditrice et romancière. Elle a déjà publié aux éditions Anne Carrière Le Fils de Sam Green, Avant les singes et La Horde.
C'est la cavale improbable de personnages qui n'auraient jamais dû se rencontrer : Jason, le célèbre photographe et Hannah, la pianiste talentueuse, Givert, le flic complotiste, Rémy le voleur de voiture, Ricardo le shaman et Bill l'informaticien. Tous embarqués pour réaliser la dernière promesse à une amie, l'énigmatique Gladys, de disperser ses cendres sur sa terre natale, l'île de Tristan de Cunha, la plus isolée au monde.
C'est une poursuite acharnée menée par le commissaire Le Tallec, jusqu'à un final inattendu et flamboyant.
C'est aussi une folle histoire d'amour à trois, passionnelle, non conventionnelle, extraordinaire, et comment on s'en relève.
C'est un texte d'une grande liberté, foutraque et réaliste, grave et loufoque, une allégorie qui met notre monde à l'épreuve de son absurdité. Mais aussi un récit à suspens qui nous emporte sans temps mort à la vitesse... d'une péniche.
On retrouve la plume musicale, fluide et poétique qui a fait le succès du premier roman de Fabrice Capizzano, patinée de suspens et d'humour, dans une fuite régénérante hors des sentiers battus.
C'est l'histoire d'un banquier qui veut tout dépenser.Au début des années 90, le jeune Bataille arrête la philosophie pour s'inscrire dans une école de commerce et décroche son premier poste à Béthune, dans la succursale de la Banque de France.Dans cette ville où la fermeture des mines et les ravages du néolibéralisme ont installé un paysage de crise, la vie du Trésorier-payeur devient une aventure passionnée : protégé par le directeur de la banque, Charles Dereine, il défend les surendettés, découvre le vertige sexuel avec Annabelle, une libraire rimbaldienne, s'engage dans la confrérie des Charitables, collabore avec Emmaüs et rencontre l'amour de sa vie, la dentiste Lilya Mizaki.Comment être anarchiste et travailler dans une banque ? Peut-on tout donner ? Yannick Haenel raconte comment il est possible, par la charité et l'érotisme, de résister de l'intérieur au monde du calcul.
On l'appelait le «mage du Kremlin». L'énigmatique Vadim Baranov fut metteur en scène puis producteur d'émissions de télé-réalité avant de devenir l'éminence grise de Poutine, dit le Tsar. Après sa démission du poste de conseiller politique, les légendes sur son compte se multiplient, sans que nul puisse démêler le faux du vrai. Jusqu'à ce que, une nuit, il confie son histoire au narrateur de ce livre...Ce récit nous plonge au coeur du pouvoir russe, où courtisans et oligarques se livrent une guerre de tous les instants. Et où Vadim, devenu le principal spin doctor du régime, transforme un pays entier en un théâtre politique, où il n'est d'autre réalité que l'accomplissement des souhaits du Tsar. Mais Vadim n'est pas un ambitieux comme les autres : entraîné dans les arcanes de plus en plus sombres du système qu'il a contribué à construire, ce poète égaré parmi les loups fera tout pour s'en sortir.De la guerre en Tchétchénie à la crise ukrainienne, en passant par les Jeux olympiques de Sotchi, Le mage du Kremlin est le grand roman de la Russie contemporaine. Dévoilant les dessous de l'ère Poutine, il offre une sublime méditation sur le pouvoir.
Autrefois, Zem Sparak fut, dans sa Grèce natale, un étudiant engagé, un militant de la liberté. Mais le pays, en faillite, a fini par être vendu au plus offrant, malgré l'insurrection. Et dans le sang de la répression massive qui s'est abattue sur le peuple révolté, Zem Sparak, fidèle à la promesse de toujours faire passer la vie avant la politique, a trahi. Au prix de sa honte et d'un adieu à sa nation, il s'est engagé comme supplétif à la sécurité dans la mégalopole du futur. Désormais il y est «chien» -c'est-à-dire flic - et il opère dans la zone 3, la plus misérable, la plus polluée de cette Cité régie par GoldTex, fleuron d'un post-libéralisme hyperconnecté et coercitif. Mais au détour d'une enquête le passé va venir à sa rencontre.
Avec "Chien 51", Laurent Gaudé s'aventure dans le "futur" ; à la fois lyrique, philosophique et tragique, politique aussi, c'est toujours l'homme qu'il questionne.
France, milieu du XIXe siècle. Voici l'étonnante histoire d'Augustin Mouchot, fils de serrurier de Semur-en-Auxois, obscur professeur de mathématiques, devenu inventeur de l'énergie solaire grâce à la découverte d'un vieux livre dans sa bibliothèque. La machine qu'il construit et surnomme Octave séduit Napoléon III et recueille l'assentiment des autorités et de la presse. Elle est exhibée avec succès à l'Exposition universelle de Paris en 1878. Mais l'avènement de l'ère du charbon ruine ses projets que l'on juge trop coûteux. Après moult péripéties, dans un ultime élan, Mouchot tente de faire revivre le feu de sa découverte sous le soleil d'Algérie. Trahi par un collaborateur qui lui vole son brevet, il finit dans la misère, précurseur sans le savoir d'une énergie du futur.